Resume-Cette étude est consacrée à la question du veuvage en tant que lieu d'oppression par excellence des femmes en Afrique à travers le film Widow d'Agatha Amata et Kingsley Ogoro, La révolte d'Affiba et Le prix de la révolte de la romancière Regina Yaou. L'étude s'appuie sur la théorie womaniste telle que formulée par Chikwenye Ogunyemi et Mary E. Kolawole qui revendiquent la libération des femmes africaines du joug patriarcal tout en préconisant le compromis et la con la femme. L'analyse des ouvrages révèle l'humiliation et l'injustice infligées aux veuves, mais elle met aussi en exergue la révolte de la femme moderne contre les prescriptions patriarcales imposées aux veuves et leur destitution par leurs belles-familles. Elle remet en question la conception traditionnelle des rapports entre l'homme et son épouse dans la vision du monde africain, afin de revendiquer les droits de la femme et de sa progéniture à l'héritage. La conclusion souligne l'impuissance face à leurs bourreaux et de l'autre, la révolte. # Motsclés : femme africaine, problématique, veuvage, film, roman, womanisme africain, engagement. Pour quelles raisons l'humanité en son entier et dévalorisant le féminin, et traduit ces systèmes de pensée en actions et en situations de fait? (Tanella Boni). # GJHSS-A Classification: FOR Code: 419999 Cette étude est consacrée à la question du veuvage en tant que lieu d'oppression par excellence des femmes en Afrique à travers le film Widow d'Agatha Amata et Kingsley Ogoro, La révolte révolte de la romancière Regina Yaou. L'étude s'appuie sur la théorie womaniste telle que formulée par Chikwenye Ogunyemi et Mary E. Kolawole qui revendiquent la libération des femmes africaines du joug patriarcal tout en préconisant le compromis et la conciliation entre l'homme et la femme. L'analyse des ouvrages révèle l'humiliation et l'injustice infligées aux veuves, mais elle met aussi en exergue la révolte de la femme moderne contre les prescriptions patriarcales imposées aux veuves et familles. Elle remet en question la conception traditionnelle des rapports entre l'homme et son épouse dans la vision du monde africain, afin de revendiquer les droits de la femme et de sa progéniture à l'héritage. La conclusion souligne deux situations des veuves opprimées: d'un côté, l'impuissance face à leurs bourreaux et de l'autre, la révolte. femme africaine, problématique, veuvage, film, roman, womanisme africain, engagement. Pour quelles raisons l'humanité en son entier a-t-elle développé des systèmes de pensée valorisant le masculin et dévalorisant le féminin, et traduit ces systèmes de pensée en actions et en situations de fait? (Tanella 419999 Cette étude est consacrée à la question du veuvage en tant que lieu d'oppression par excellence des femmes en Afrique à travers le film Widow d'Agatha Amata et Kingsley Ogoro, La révolte révolte de la romancière Regina Yaou. L'étude s'appuie sur la théorie womaniste telle que formulée par Chikwenye Ogunyemi et Mary E. Kolawole qui revendiquent la libération des ciliation entre l'homme et la femme. L'analyse des ouvrages révèle l'humiliation et l'injustice infligées aux veuves, mais elle met aussi en exergue la révolte de la femme moderne contre les prescriptions patriarcales imposées aux veuves et familles. Elle remet en question la conception traditionnelle des rapports entre l'homme et son épouse dans la vision du monde africain, afin de revendiquer les droits de qui revendiquent la libération des femmes africaines du joug patriarcal tout en préconisant le compromis et la conciliation entre l'homme et la femme. L'analyse des ouvrages révèle l'humiliation et l'injustice infligées aux veuves, mais elle met aussi en exergue la révolte de la femme moderne contre les prescriptions patriarcales imposées aux veuves et leur destitution par leurs belles-familles. Elle remet en question la conception traditionnelle des rapports entre l'homme et son épouse dans la vision du monde africain, afin de revendiquer les droits de la femme et de sa progéniture à l'héritage. La conclusion souligne deux situations des veuves opprimées: d'un côté, l'impuissance face à leurs bourreaux et de l'autre, la révolte. La première, accentuée dans Widow par Amata et Ogoro requiert la solidarité féminine comme solution au problème. La deuxième préconisée par Yaou fait appel à l'action subversive afin de sensibiliser la société patriarcale à la cause des veuves et partant, bouleverser les moeurs nuisibles à leur égard. Ensuite elle revendique le compromis impératif entre la famille nucléaire et élargie de l'homme en ce qui concerne le partage de son héritage. Les positions des cinéastes et de la romancière rejoignent ainsi l'idéologie womaniste, de façons différentes certes, mais elles traduisent le même engagement non seulement pour la libération des veuves mais aussi pour l'émancipation de la femme en général. Dans la même veine, La révolte d'Affiba et Le prix de la révolte démontrent l'histoire d'une veuve dans la société ivoirienne. Ces oeuvres proposent une réponse de la femme africaine moderne au sujet du veuvage et du droit de la femme à l'héritage. Dans le premier roman, Affiba, une jeune avocate, tombe amoureuse de Koffi Mensah, un architecte, la veille de son départ pour la France où elle compte faire sa spécialité dans les assurances. Les deux jeunes gens se marient en France. Le mari rentre avant sa femme et obtient un crédit qu'il ajoute à leur économie pour faire construire une belle maison pour sa famille. Affiba rentre plus tard et trouve un bon emploi comme inspectrice dans une agence d'assurances. Elle travaille assidûment pour aider son mari. En fait, c'est grâce à l'argent d'Affiba que Koffi arrive à constituer le capital nécessaire pour monter, avec un groupe d'amis ingénieurs dans divers secteurs, un cabinet d'ingénieurs-conseillers. Cette affaire de Koffi réussit énormément et sa femme s'épanouie. Pourtant, tout va à la dérive lorsque Koffi, peu après l'ouverture du cabinet, prend une maîtresse et abandonne sa famille pour vivre avec sa maîtresse et leur enfant. Affiba est déçue et affolée. En fin de compte, Koffi retourne en famille après deux ans mais meurt peu après. L'histoire de Le prix de la révolte commence là où celle de La révolte d'Affiba s'arrête et raconte les événements qui se déroulent dix ans après le décès de Koffi. # Introduction Le womanisme africain proposé par Chikwenye Okonjo Ogunyemi (1985Ogunyemi ( ,1996) ) et Mary E. Modupe Kolawole (1997) sert de cadre théorique pour cette étude. La théorie womaniste africaine est une théorie féministe conceptualisée spécifiquement pour analyser la condition de la femme africaine. Elle revendique la libération des Africaines de l'oppression patriarcale mais préconise en même temps l'entente, la compréhension, le compromis, la conciliation entre l'homme et la femme. Elle souligne également la complémentarité entre les deux sexes. Comme toute théorie féministe, le womanisme reconnaît l'importance de la solidarité féminine dans la lutte contre l'assujettissement de la femme. # II. # La Veuve Culpabilisée Le calvaire des deux protagonistes des ouvrages choisis pour cette étude commence suite à la mort de leurs maris. Il est pertinent de constater que le film Widow est basé sur une histoire réelle. Autrement dit, la souffrance du personnage principal dans le film représente une expérience vécue d'une veuve au Nigéria. La belle-famille de Nnena lui en veut parce qu'elle est considérée comme une égoïste qui a joui toute seule des biens de son mari. En effet, la société traditionnelle en Afrique a du mal à accepter le couple monogame et l'épouse dans ce genre de famille est généralement enviée et détestée parce que chacun dans la famille élargie de l'homme pense qu'elle l'empêche de jouir de ce qui lui revient de droit. Donc la mort inattendue d'un mari, surtout d'un mari riche, est considérée comme un coup lancé par sa femme afin de s'emparer de la possession de l'homme. Ainsi, au lieu de compatir avec une veuve, la belle-famille cherche à la culpabiliser et à la déposséder. Nnena est accusée de meurtre et subit un affront incroyable de ses beaux-parents. Pendant le deuil, elle est aspergée de crachats, accablée d'injures et même battu. Le conseil des anciens siège et décrète qu'elle doit subir une épreuve recommandée par la tradition. Cette épreuve est à l'envergure de l'animosité de sa belle-famille à son égard et consiste en deux volets. Premier volet, elle est enfermée dans une chambre avec le cadavre de son mari pendant trois jours; puis elle est contrainte à boire une quantité de l'eau utilisée pour laver le cadavre; et elle est amenée sur la place publique du village aux heures prescrites pour « hurler sa détresse » devant un auditoire méprisant et agressif. Le deuxième volet de la cérémonie vient à la fin des funérailles. C'est le domaine des femmes du village -les Umuada -et il est présidé par la belle-mère. Encore, le procédé de la cérémonie est à la hauteur de la haine de ces femmes contre la victime. Ces femmes pensent que Nnena leur a privé de leur soutien financier. « Who will pay our children's school fees now? » (Désormais, qui va payer la scolarité de nos enfants?) revient comme leitmotiv dans leurs conversations et ce sont de tels sentiments qui nourrissent leurs actions pendant la cérémonie. Le film nous présente ici d'une manière vivante la femme comme bourreau de la femme en Afrique. Les Umuada servent d'instrument au patriarcat, pour opprimer la jeune veuve. Pourquoi? Parce qu'au cours des années, elles se sont tellement identifiées avec l'oppression patriarcale qu'elles ne pensent ni à se révolter contre le système ni à se solidariser avec les jeunes pour se débarrasser de ce joug. Le constat que fait l'une de ces femmes sur le fait qu'elles sont obligées de danser au son de la musique imposée par les ancêtres, témoigne de leur résignation au sort. Sans poser de questions elles assistent le patriarcat à perpétuer l'oppression de la femme. La position womaniste face à ce problème consiste à éduquer, à sensibiliser et à éveiller la conscience de toute catégorie de femmes afin qu'elles s'interposent vis-à-vis de ce fléau. Voici la pertinence des films comme Widow et des romans comme La révolte d'Affiba et Le prix de la révolte. d'un homme est sa femme. D'après Rangira Gallimore (1994), « en Afrique, c'est à travers le corps de la femme que la société se maintient et se perpétue. Ainsi ce corps doit -il être façonné, contrôlé et marqué ». La tradition de lévirat montre à quel point la femme est contrôlée, malmenée et déshumanisée dans son corps. Normalement, c'est le cadet qui hérite de l'aîné mais il est des cas aberrants comme dans Une si longue lettre de Mariama Bâ où l'aîné, par convoitise, prétend ajouter la femme de son frère cadet à son harem. Ainsi, malgré l'éducation et le standing social de la protagoniste de Bâ, son beau-frère illettré a l'audace de lui faire une proposition de mariage parce qu'il ne voit en elle qu'une femelle. Imprégné de la conception du corps de la femme comme objet à posséder, le conseil des anciens du village de Chima demande que sa veuve soit héritée par son frère aîné, Ifeanyi, bourreau principal de cette dernière. L'union avec le beau-frère vise à donner à ce dernier non seulement le droit à la possession de Chima mais aussi au corps de Nnena qui est considéré comme un objet de consommation. Autrement dit, la femme n'a pas le droit de son corps même après la mort de son mari. Il est aussi évident que ce mariage est conçu pour humilier Nnena. D'abord elle est plus scolarisée que son beau-frère. De plus, cet usurpateur était un employé dans l'une des compagnies appartenant à son mari et à elle. Malgré la supériorité sociale de Nnena, la société patriarcale la considère comme une subalterne sans voix. Nnena refuse carrément le lévirat et la réponse de sa belle-mère est catégorique : « Then prepare to leave this house alone. You cannot take our kids and at the same time, you cannot take anything that belongs to my son with you. » (Alors prépare-toi à quitter cette maison toute seule. Tu ne pourras pas partir avec nos enfants et en même temps tu ne prendra aucun des biens de mon fils). Selon la tradition, le fruit du corps de la femme appartient au mari et à son clan. Pire, comme le constate l'avocat de Nnena, le système judiciaire reconnaît la loi religieuse et coutumière et ces lois en général, privilégient l'homme au détriment de la femme. Malgré les protestations de Nnena, sa belle-mère et son beau-frère Ifeanyi s'installent chez elle et commencent à maltraiter ses enfants. Qui plus est, Ifeanyi essaie de coucher avec elle. « I have come to claim my rights, my cojugal rights » (Je suis venu réclamer mes droits, mes droits sexuels) dit-il. Evidemment il envisage, par l'acte sexuel, à la subjuguer. Mais plus grave, il ne s'attend pas à ce qu'elle résiste à cette proposition, ce qui montre jusqu'à quel point la femme est chosifiée dans la mentalité patriarcale. Par comble des choses, Nnena surprend ce même Ifeanyi et sa belle-mère en train de parler de l'éliminer parce qu'elle est officiellement l'ayant droit de son feu mari. Consciente du danger, elle s' échappe pendant la nuit et trouve asile chez une amie. En fin de compte, c'est par l'aide d'une autre amie, une avocate, qu'elle parvient à envoyer ses enfants à l'étranger hors de menace de sa belle-famille. Ici, les cinéastes présentent les jeunes femmes éveillées sous l'égide de lutteuses unifiées pour résister à l'oppression de la société patriarcale. Ils soulignent l'importance de female bondingsolidarité des femmes -préconisée par les womanistes comme instrument efficace de lutte pour l'émancipation de lafemme en Afrique. A l'instar de Nnena dans le long métrage Widow, le personnage principal dans La révolte d'Affiba et Le prix de la révolte, doit elle aussi faire face à la question d'héritage. Affiba est sommée par sa belle-famille de quitter son foyer conjugal, mais elle refuse de se laisser dépouiller et insiste sur ses droits et ceux de ses enfants. Elle se révolte contre cette tradition qui cherche à l'écraser, à la rendre en « sans-abris » alors qu'elle a travaillé très dur pour assurer la stabilité de sa famille. Il lui est répulsif d'être destituée alors que d'autres qui n'ont pas levé le petit doigt comptent jouir du fruit de son labeur. Avertie de l'arrivée de ses beaux-parents chez elle, Affiba s'apprête à les confronter: « Je leur apprendrais que les choses ont changé... ils s'imaginent que je vais me laisser délester de tout ce que je possède. Il y a des biens que nous avons acquis ensemble, tout de même! Lorsque j'avais tout vendu pour aider Koffi, où étaient ses parents? » (136). De leur côté, les parents de Koffi croient qu'ayant tout sacrifié pour éduquer leur fils, ils ont droit à ses biens. Quant à sa femme, elle n'a aucun droit sur la propriété de son mari puisqu'elle n'a pas de lien de sang avec cette famille. Si elle a fait des sacrifices elle aussi pour contribuer à l'éducation de Koffi, elle n'a fait que remplir son devoir de femme. Par contre, leurs sacrifices pour la réussite de leur fils sont pour eux un investissement qui doit rapporter des gains. C'est à ce titre qu'ils considèrent la maison de Koffi comme la leur. Mais Affiba décide de se lever contre cette loi odieuse, espérant que son cas servira à libérer d'autres femmes du joug patriarcal. Par opposition à Affiba, sa mère quant à elle, prêche la docilité et conseille à sa fille de céder puisque c'est ainsi que veut la tradition. Cette femme, comme les Umuada dans Widow, accepte les préjugés contre la femme sans se poser de questions, et à force d'inhiber la notion de la dite infériorité de la femme, elle devient de fait inférieure. D'après la vieille, « c'est la coutume de chez nous qui veut que les parents du défunt récupèrent les biens de ce dernier à sa mort! Pourquoi s'y opposer?... C'est la coutume et ce n'est pas toi Affiba, une petite fille comme cela qui vas changer le cours des choses » (140) (Nous soulignons). L'expression « une petite fille » traduit avec éloquence, l'acceptation chez cette femme de son assujettissement. Comme on l'a bien constaté, ce sont surtout les femmes traditionnelles qui répandent ces idées discriminatoires parce qu'elles sont conditionnées à se considérer comme des subalternes qui ne peuvent pas prendre la parole. En effet, la révolte d'Affiba est contre les coutumes qui cherchent à la bâillonner. Yaou, à travers son protagoniste réclame non seulement le droit de la femme à s'exprimer mais revendique aussi le bouleversement des traditions qui oppriment les femmes. C'est dans cette optique que le discours de Yaou dans ces romans devient subversif. La société d'Affiba est certainement tiraillée par les exigences de la tradition et de la modernité. La querelle de la jeune femme avec ses beaux-parents est une démonstration de ce dilemme. Ses beaux-parents sont ancrés dans la tradition qui conçoit la femme comme esclave de son mari et ils semblent avoir oublié que leur fils a épousé sa femme selon le droit civil qui accorde une grande importance à la femme et l'associe à l'héritage. Puisque Koffi les a « quittés » pour fonder une nouvelle famille avec sa femme, ses devoirs envers l'épouse l'emportent dès lors sur ceux de sa famille élargie. La loi exige également qu'à la mort de son mari, Affiba devient la tutrice des enfants, les héritiers légitimes et il lui revient d'administrer les biens de son mari. Maintenant, les parents de Koffi ont affaire non pas à une analphabète mais à une femme professionnelle qui a contribué autant que son mari à la réussite de leur famille et qui n'acceptera pas d'être exclue des biens qu'elle a pu acquérir ensemble avec lui. Elle rappelle donc à ses beaux-parents que la maison et tout autre possession dont ils cherchent à s'emparer lui appartiennent aussi: J'ai continué à « serrer la ceinture » parce que Koffi construisait cette maison qui vous fait tant envie; au moment où Koffi rentrait de stage... je l'ai épaulé; c'est même moi qui ai fourni sa part du capital pour ouvrir le cabinet... Je n'aurais peiné si c'était pour me retrouver à la rue avec mes enfants, en moins de dix ans de mariage!... Dans tout ménage, la femme investit aussi et elle n'acceptera pas d'être dépouillée par des héritiers surgis d'on ne sait où! (146-147). La position de la protagoniste constitue donc un affront au système patriarcal traditionnel soutenu par des conventions discriminatoires. Affiba remet en question la domination oppressive de l'homme symbolisée par ses beaux-parents et revendique ses droits. Mais au delà de ses problèmes personnels, c'est contre l'objectivation de toutes les femmes que lutte Affiba dans sa guerre d'héritage. C'est à ce titre qu'elle parle pour les femmes rurales qui sont mêmes plus opprimées que les citadines: Ces femmes, même si elles n'apportaient pas d'argent dans le foyer, étaient utiles: il leur fallait accompagner leur mari à la plantation et mettre la main à la pâte; pourtant lorsque ces plantations produiraient, elles n'en verraient peut-être même pas la couleur des fruits. Tout simplement parce que leurs maris seraient morts et que la famille de ces derniers auraient tout accaparé (Le prix 21). Autrement dit, les femmes qui triment tout au long de leur vie à côté de leurs maris vivent dans une insécurité permanente. Parfois elles intensifient leurs efforts afin de mettre quelque chose de côté au cas du décès de leurs maris. C'est la stratégie explorée par la mère d'Affiba qui se lie avec ses frères dans la culture du cacao pour sauvegarder l'avenir. Mais Yaou, à travers son protagoniste cherche à faire comprendre à toute belle-famille que les temps ont changé. «La femme n'apporte plus seulement la force physique à l'entreprise de son mari, elle apporte aussi une participation financière concrète et donc ne peut plus accepter d'être dépouillée». Or, tout en préconisant la justice pour la femme, Affiba en porte-parole de l'écrivaine, ne préconise pas pour autant de négliger la famille d'origine de l'homme. Elle fait une analyse très lucide de la situation quand elle dit: Si le monde a changé et que la loi des Blancs a remplacé la coutume, nous n'en demeurons pas moins Noirs et Africains... Il faut donc trouver un point d'équilibre car nous ne pouvons pas nous permettre de réagir exactement comme nous dicte la loi des Blancs, pas plus que nous ne pouvons obéir aveuglément à la coutume, comme je vous disais?Faut-il, au mépris de tous les sacrifices souvent consentis par les parents pour la réussite du disparu, que la femme garde tous les biens? Non, je ne le crois pas. Ou alors faut-il jeter dehors la veuve, qui autrefois, aida son mari à acquérir ces biens tant convoités ? Faut-il nier aux enfants, pour qui leurs parents se privaient, tout droit de regard sur ce que laisse le défunt? Non plus. Voilà pourquoi un compromis s'impose. Le partage des biens entre les héritiers coutumiers et les ayants-droit légaux ( 182 -183). Les femmes, victimes de l'oppression patriarcale, admirent Affiba « pour son cran ». Certes, elles ont d'exprimer ouvertement ce qu'elles ressentent mais elles reconnaissent en Affiba leur porte-parole. Celle-ci exerce, en particulier, une influence positive sur la jeune génération. A titre d'exemple, Ama la jeune nièce de Koffi, à qui selon la loi de la société, revient l'héritage du défunt, a des leçons à donner à son grand-père: « regarde encore tante Affiba! Cela fait dix ans qu'elle lutte pour vous faire fléchir, vous faire comprendre que la seule solution à ce problème, c'est un compromis?Il faut régler rapidement ce problème avec tante Affiba. Il faut accepter le compromis qu'elle propose » (Le prix 189 -190). En effet, Affiba propose le partage de l'héritage non seulement à la famille de son mari mais aussi à son enfant illégitime. Mensah, le beau-père d'Affiba, est stupéfait lorsqu'il découvre que cette dernière a fait construire trois maisons pour sa belle-famille en plus de cinq cent mille francs qu'elle veut lui donner. Affiba est ainsi une partisane des principes de l'entente et du compromis préconisés par le womanisme. En fin de compte, le vieux Mensah se fait l'écho de sa bru et de sa petite-fille lorsqu'il dit: Le monde est perpétuellement en mutation. Et à ce changement il faut s'adapter ou périr... En reconnaissant à Affiba et aux enfants des droits sur l'héritage de Koffi, je ne fais que me ranger aux côtés de ceux qui ont compris que notre monde ne survivra que si nous savons faire une synthèse entre la coutume et la loi, le traditionnel et le modernisme, que si nous savons trouver des compromis. Car le compromis, comme le disait Affiba, est le mot-clé qui doit régler nos problèmes quand ils mettent face à face la tradition et le modernisme, nos coutumes et celles des Blancs (203). Affiba gagne ainsi la lutte contre sa propre oppression et insiste à définir sa réalité. Mais si son histoire se termine sur une note positive et de triomphe, par contre celle de la protagoniste de Widow laisse un goût amer dans la bouche. L'on peut même suggérer que le film nous présente la réalité des veuves alors que les romans prévoient pour l'avenir, un bon dénouement à la saga des veuves. En effet, l'histoire de la veuve dans le roman d'une autre écrivaine ivoirienne, Anne-Marie Adiaffi, ressemble plutôt à celle de Nnena. Ago, dans Une vie hypothéquée (2000), est non seulement exclue avec ses enfants du droit de succession après la disparition de son mari, mais elle est terriblement humiliée par dessus le marché. Nous avons cité cet exemple pour montrer que ce ne sont pas toutes les veuves dépeintes dans les oeuvres des romancières d'Afrique francophone qui ont l'audace et le succès d'Affiba. Pourtant, le fait de représenter ce problème traduit déjà l'engagement des écrivaines en ce qui concerne le problème des veuves en Afrique et la volonté de lutter contre cette discrimination sexuelle. # IV. # Conclusion La représentation de l'oppression des veuves dans les ouvrages sélectionnés pour cette étude témoigne de la préoccupation de leurs auteurs pour cet obstacle à l'émancipation de la femme. D'après notre analyse, l'on constate que dans les sociétés africaines, la situation d'une veuve est un cas très délicat. En effet, elle est dans la famille un être fragile. D'abord, elle subit un procédé barbare et dégradant pendant les funérailles de son mari et puis elle est écartée du partage de l'héritage en dépit de sa contribution à rassembler cet héritage. Cette tradition constitue une grande injustice à l'encontre de la femme. Qui plus est, elle détruit l'avenir des enfants. Le film Widow est une dramatisation très vivante de la problématique du veuvage en Afrique et il a pour but d'attirer l'attention du public à la situation angoissante des ces femmes. Ce souci des cinéastes Amata et Ogoro reflète une préoccupation des womanistes de libérer les femmes de ce fardeau écrasant. De son côté, Yaou dans ses romans, se veut délibérément subversive dans le but de sensibiliser le public contre ce fléau. Cette sensibilisation vise à éveiller la conscience du peuple et à chercher une solution libératrice. Les titres mêmes des romans, « La révolte d'Affiba », « Le prix de la révolte », soulignent le souci de la romancière de concevoir des personnages féminins non comme de simples victimes mais surtout comme des femmes fortes qui s'élèvent contre l'injustice et l'oppression. Elle montre que l'éducation formelle et la vie professionnelle ont éveillé la conscience des femmes si bien qu'elles ne veulent plus se laisser faire. Il faut donc que le patriarcat reconnaisse ces changements et renonce à l'injustice faite aux femmes, en l'occurrence, les veuves. Comme le constate bien Badini-Kinda (2010:31), « l'accès à une vie professionnelle est considéré comme la première des mutations et la plus importante pour la situation de la femme. Elle contribue au changement de son statut social ». C'est grâce à son indépendance économique renforcée par sa vie professionnelle que la protagoniste de Yaou réussit à réclamer ses droits. Mais au lieu de demeurer intransigeante, elle fait preuve de maturité et de compréhension. Par le biais de ce personnage, la romancière préconise l'entente et le compromis face à la question des veuves en Afrique et rejoint ainsi les tenantes du womanisme. # Ouvrages Cites Obafemi Awolowo University Obafemi Awolowo Universityla femme deux situations des veuves opprimées: d'un côté, femme africaine, problématique, veuvage, film, roman, womanisme africain, engagement. Pour elle développé des systèmes de pensée valorisant le masculin et dévalorisant le féminin, et traduit ces systèmes de pensée en actions et en situations de fait? (Tanella Chima est un mari très attentionné et amoureux de safemme. Il lui procure des terrains et subvient à tous sesbesoins. Il est aussi très généreux envers sa familleélargie. Son frère aîné, Ifeanyi, est employé dans sacompagnie mais à un moment donné, il découvre quece dernier l'escroque systématiquement. Confronté àson forfait, Ifeanyi se montre récalcitrant et menacemême son frère. Chima est obligé de le poursuivre en justice à l'encontre du désir de sa femme. Sachant qu'i l risque d'être déclaré coupable, Ifeanyi cherche l'appui de leur familledécidé de le tuer, voir Bestman 2013). Ces deux proverbes yoruba résument la conception de la femme dans la société patriarcale en Afrique. De tels préjugés traduisent la haine et le soupçon dont elle est l'objet encas de décès de son mari. Il faut bien le dire, l'institutiondu mariage constitue l'une des montagnes sur le dos dela femme africaine pour utiliser la métaphore bienconnue d'Ogundipe-Leslie (1994). De ce fait, l'onconstate que le veuvage est l'un des sites les plusaccablants de l'oppression de la femme africaine. Cephénomène socioculturel reflète la réalité des milieuxafricains et constitue un sujet primordial dansl'imaginaire des écrivaines africaines. Mariama Bâ, l'unedes premières écrivaines de l'Afrique francophoneaborde justement ce sujet dans son roman bien connuUne si longue lettre (1980). Cinq ans plus tard et mêmeune douzaine d'années après, Regina Yaou, laromancière ivoirienne reprend ce sujet de façon plusélaborée dans La révolte d'Affiba (1985) et sa suite Leprix de la révolte (1997) où elle accentue davantage lemauvais réservé à la veuve dans le milieu africain. Laromancière est issue de la société akan où les femmessont obligées d'affronter l'hostilité des beaux-parents, etsont traitées des objets à abandonner après le décès deleurs partenaires. Evidemment, ces deux romanss'inspirent de l'expérience vécue des compatriotes deYaou. En 2007, les cinéastes nigérians Kingsley AgathaAmata et Kingsley Ogoro réalisent un film très réussiintitulé Widow (Veuve) sur le même sujet. Cet article seveut une étude de la thématique du veuvage dans cesouvrages.Le choix du corpus est animé par la pluralitédes genres -l'écrit et le visuel -qui permet une vueplurielle pour aborder la problématique du veuvage. Lesromans visent une couche sociale élevée, Widow estconçue pour toutes les couches sociales. Les premiersrelèvent de l'écriture, le deuxième de l' art populaireaudio-visuel. Ces deux moyens d'expression permettentainsi aux auteurs d'atteindre un public plus élargi étantdonné l'importance du sujet.bìrin bím? fùn ni ò ní kó má pá ni. (Qu'une femme ait enfanté pour un homme ne l'empêche pas de le tuer). ?kùnrin tí kò tíí kú aya r? ni ò tíí paa. (Un homme est vivant tant que sa femme n'a pas Year 201739Volume XVII Issue III Version I( A )III. Il est sûr et certain que le mauvais traitement de La Question D'héritage la veuve en Afrique est motivé par un penchant pour le matériel. Les règles de la société traditionnelle veulentGlobal Journal of Human Social Science -qu'à la mort d'un homme, ses parents prennentpossession de tous ses biens. Autrement dit, la femme etles enfants du défunt seraient complètement dépouillésau profit de sa famille élargie. Dans cette logique, uneépouse ne jouit d'aucun droit dans sa famille conjugale.Tout au plus, elle est considérée comme un simple objet,une possession à hériter et dans plusieurs cultures enAfrique, la première possession à hériter après le décès © 2017 Global Journals Inc. (US) La Femme Africaine Moderne Face a La Problématique Du Veuvage a Travers Widow d'Agatha Amata Et Kingsley Ogoro, La Révolte d'Affiba Et Le Prix De La Révolte De Regina Yaou * Une vie hypothéquée Anne-MarieAdiaffi 2000 Abidjan : NEI * AgathaAmata KingsleyOgoro 2007 Kingsley Ogoro Productions Nigeria * Une si longue lettre MariamaBa 1980 Dakar : NEA * FatoumataBadini-Kinda «Femmes, foyer, activités professionnelles: Les termes des débat au Burkina Faso». Rollinde Marguerite 2010. 2010 * Genre et Changement Social en Afrique Paris: Editions archives contemporaine * «Une étude womaniste des proverbes yoruba AjokeBestman Mimiko Parémiologie: Proverbes et formes voisines. Tome 1 Jean-MichelBenayoun Nathalie&Kübler Jean-PhilippeZouogbo Paris 2013. 2013 Presse Universitaire de Saint Gemme * TanellaBoni Que vivent les femmes d'Afrique? 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