# Introduction e Tchad devient une terre de refuge pour certaines populations de pays voisins en conflits armés depuis ces deux dernières décennies, et ce malgré son instabilité récurrente. Cet afflux de réfugiés constitue un défi à la fois humanitaire et sécuritaire multiforme, surtout, avec l'implication directe du Tchad dans la lutte contre l'extrémisme violant. Si la difficulté d'accueil des réfugiés de la guerre civile (Soudan et Centrafrique) se manifestait souvent en termes structurels, institutionnel et, par l'entremêlement des populations, communautaires, celle de la guerre asymétrique (Nigéria) se pose sous angle sécuritaire, rendant la conciliation entre le devoir d'accueil et les impératifs sécuritaires extrêmement difficile. Les infiltrations des éléments de Boko Haram au sein des réfugiés nigérians, avaient suscité de la méfiance et de la suspicion à leur égard. La crainte donc d'une déstabilisation du pays par ce groupe terroriste tourne à l'obsession sécuritaire. En effet, la menace diffuse et imprévisible de cette nouvelle guerre, aggrave l'instabilité au Tchad, qui est confronté d'ailleurs, aux incursion s répétées de groupes armés politicomilitaires. Il est à cet effet, cité en exemple de la déliquescence des Etats africains. C'est dans ce climat d'instabilité périodique que le e pays s'est hissé au rang des pays accueillant le plus de réfugiés au monde par rapport au nombre de sa population. Mais, l'enlisement sans perspective des réfugiés dans des camps, le poids socio-économique de l'accueil et l'arrivée de réfugiés de la guerre asymétrique, constituent le fond du défi de la présence massive des réfugiés au Tchad. Pourtant, ces éléments sont peu étudiés en dépit de leur importance. Toutefois, l'afflux de réfugiés soudanais, centrafricains et nigérians au Tchad au cours des deux dernières décennies a enclenché spontanément d'énormes élans de solidarité de la population hôte, du gouvernement mais aussi de la communauté internationale. Les médias, tout en entretenant la sensation au moment de l'afflux, diffusent des informations importantes sur la condition dramatique de ces réfugiés. Mais, au fur et à mesure que ceux-ci, s'enlisent dans des camps ou dans des sites d'accueil, l'emballement médiatique et l'émotion populaire à leur égard s'estompent et les réfugiés tombent dans l'oubli. L'Etat et quelques-uns de ses partenaires humanitaires nationaux et internationaux, se trouvent souvent bien seuls pour susciter l'urgence humanitaire en faveur de ces réfugiés de longue durée à travers des rapports mensuels, trimestriels et annuels sur les conditions de vie de réfugiés dans leurs différents lieux d'hébergement. Cette masse d'information doublée par celles des médias, constitue des sources primaires importantes pour les chercheurs de tous bords. Mais, l'abondance des sources sur cette question de réfugiés au Tchad, ne semble pas aiguiser la curiosité des chercheurs car la littérature autour du sort de réfugié, de leur rapport avec la population hôte ainsi que le poids de leur accueil sur le pays, sont peu ou pas étudiés. La littérature sur les conflits armés à l'origine de flux des réfugiés au Tchad est assez abondante. Elle ne cesse d'ailleurs de capter l'attention des chercheurs de tous bords. Mais le sort des réfugiés dans la plupart de ces études, n'est évoqué qu'à titre d'exemple ou bien en termes vagues. Toutefois, l'inventaire de travaux scientifiques sur les problématiques de réfugiés au Tchad, fait ressortir quelques rares études d'ordre catégoriel. Après l'intéressant travail de Marc André Lagrange (2006) et de celui de Johanne Favre (2007), la recherche scientifique proprement dite sur cette question a semblé figée. Le premier a mis en exergue, la difficulté de cohabitation entre les réfugiés du Darfour et la population hôte de l'Est du Tchad, tandis que le second analyse le bilan mitigé de la sécurisation militaire des réfugiés et déplacés dans l'Est et le Sud du Tchad par une force multinationale comprenant une mission des Nations Unies (la MINURCAT) et une force militaire européenne (l'EUFOR Tchad/RCA). Il a fallu attendre le mémoire de master de Djimadoumgué Tamdjim (2019) sur l'insertion des réfugiés centrafricains dans la région de Goré au Sud du Tchad ainsi que notre travail sur la confusion identitaire des retournés centrafricains au Tchad (Abakar Kassambara A., 2021) pour assister à une relance de la recherche sur le sort des réfugiés au Tchad. Etant donné l'éloignement relatif dans le temps de deux premières études, qui sont liées au fort moment d'afflux de réfugiés soudanais à l'Est du Tchad et au Nord de la RCA, notre étude doit revisiter la difficulté de la cohabitation, entre la population hôte et les réfugiés à travers l'enlisement de ces derniers dans des camps et l'absence de mécanismes tant structurels qu'institutionnels pour un accueil de longue durée. Elle tente de déterminer l'évolution de la perception populaire à l'égard de la figure des réfugiés par rapport à la nature du conflit et à la volatilité du climat sécuritaire au Tchad. Cette démarche à la fois démonstrative et comparative met en exergue la complexité de gestion de cette présence massive de réfugiés et l'irruption de réfugiés de Il en résulte donc une catégorisation des réfugiés, qui crée de facto une différence de traitement en fonction de la nature du conflit. De sorte que le droit d'asile et de protection se trouve ainsi remis en cause pour la population chassée par le terrorisme. Dans cette dualité de traitement entre « réfugiés de la guerre civile » et « réfugiés de la guerre asymétrique », comment améliorer à la fois, le mécanisme d'accueil des réfugiés de longue durée, et concilier les impératifs sécuritaires avec le droit d'asile pour les réfugiés de l'extrémisme violent ? C'est à partir donc d'ouvrages généraux, de travaux scientifiques, de rapports des organismes humanitaires, de sources médiatiques et de faits vécus que cette étude tente de répondre à ce questionnement. Elle aborde en premier lieu les cycles d'instabilité au Tchad et dans les pays voisins et l'innovation des mécanismes d'accueil des réfugiés. En second lieu, l'étude évoque la politique d'intégration des réfugiés de la guerre civile et la gestion sécuritaire de ceux de la guerre asymétrique. On peut ainsi appréhender le poids de l'afflux des réfugiés au Tchad dans toute sa dimension humanitaire et sécuritaire. Depuis cette dernière attaque, le pays semble retrouver une certaine stabilité mais le spectre d'un nouvel exode ou déplacement hante la population à cause l'incertitude politique. A ce sujet, l'incursion des éléments d'un groupe armé au début février 2019, à partir de la Libye, allait aboutir à un coup d'État n'eût été l'intervention de l'armée française (Le Monde Afrique, 13 février 2019). Cet évènement témoigne à la fois de la fragilité de la paix civile au Tchad et de la persistance de la logique de la prise de pouvoir par la force. En dépit de la volatilité de la situation sécuritaire, le Tchad devient ces dernières années, une terre d'accueil pour des centaines de milliers des réfugiés du pays voisin. Ces pays basculent à leur tour dans la violence politique et dans la guerre civile interminable. On assiste dès lors, à la décomposition de certains pays africains, qui deviennent de ce que Lat Soucabé Mbow appelle les États défaillants ne contrôlant que la capitale, où la violence des luttes pour le pouvoir engendre des flots des réfugiés (Lat Soucabé En dépit donc de ces incidents, certains réfugiés parviennent à s'intégrer socialement et économiquement dans leur environnement d'accueil. A titre d'exemple, les réfugiés du site de Gaoui près de N'Djamena, ont installé un siégaï (petit marché) à l'entrée du camp, qui devient un véritable carrefour commercial pour les riverains. Ce marché rivalise avec les deux petits marchés d'à côté. En outre, les femmes réfugiées de ce site dominent la commercialisation de la viande fraiche devant l'abattoir de Diguèl à 3 km du camp. Tandis que les hommes s'activent dans la débrouillardise et dans le commerce informel sans beaucoup de succès 3 . Ils parviennent cependant, à s'assimiler parfaitement dans la communauté d'accueil des zones rurales, où les réfugiés obtiennent sans difficulté, des parcelles de terres pour cultiver comme ce fut le cas dans le village de Dilingala au sud du Tchad (Célian Macé, 2018). Mais, l'insertion de réfugiés soudanais à l'Est du Tchad devient problématique du fait de l'environnement inhospitalier de la région. En effet, plus de 85 % des réfugiés étaient regroupés dans cette zone désertique et sahélienne peu propice à la vie, où le nombre des réfugiés ne cesse d'ailleurs d'augmenter (Favre J., 2007). En effet, leur nombre est passé à 360 000 en juillet 2020. Ce flot de réfugiés dans cette région déshéritée avait créé des déséquilibres, dans le système économique de la population hôte mais aussi des impacts environnementaux. Contrairement à la partie méridionale, l'est du Tchad -dont la population est estimée à 600 000 habitants -est une zone désertique très pauvre en ressources agricoles et hydrauliques et peu propice à accueillir d'importants groupes de population (Commission Européenne, 2004). Ainsi, l'accès aux ressources provoque parfois des tensions entre les villageois et les réfugiés. En fait, la compassion éprouvée au début par la communauté hôte envers les réfugiés se transforme en mécontentement, lorsque ces derniers tentent d'entrer dans la vie active et de s'approvisionner en paille ou bois de chauffe en dehors du camp. On signale ainsi des incidents entre les femmes réfugiées et tchadiennes autour du ramassage du bois de chauffe, qui attise la rivalité entre les deux parties et nourrit des sentiments de rejet et de la xénophobie à l'encontre des réfugiés soudanais (Marc André Lagrange 2006). Aussi est-il que l'accès à la paille pour nourrir les animaux cristallise la tension entre les 14 000 habitants de Breidjing et Tréguine et les 43 000 réfugiés soudanais des camps du même nom de village (North, R., 2005). Ces ressentiments de la communauté hôte s'expliquent d'abord, par la précarité de leur condition de vie, qui ne cesse d'ailleurs de se dégrader depuis l'intrusion massive de réfugiés dans leur région rognant au passage leurs maigres ressources. Ensuite, l'absence d'un programme d'aide en faveur de la communauté hôte au départ, qui devait alléger le 3 Volume XXII Issue II Version I 16 ( ) fardeau de l'accueil ainsi que la perte occasionnée par la présence prolongée des réfugiés sur leur terre. Enfin, la prise en charge totale des réfugiés par les organismes humanitaires comme le HCR et leurs immixtions dans les activités locales, font des réfugiés des « nantis » au moment où les autochtones croupissent dans l'indigence. Ils estiment ainsi qu'ils sont moins bien traités que les réfugiés (M-A. Lagrange, 2006). Cependant, la question de l'accueil de réfugiés n'a jamais fait l'objet d'une instrumentalisation politique et l'opinion publique semble rester compatissante envers les réfugiés. Cette attitude bienveillante peut être attribuée au vécu des Tchadiens, qui ont connu au moins une fois la vie de demandeur d'asile ou de réfugié dans les pays voisins ces quatre dernières décennies. Elle en résulte aussi des liens familiaux, surtout, tout au long de la frontière, où on trouve les mêmes groupes ethniques de deux côtés de la frontière. A titre d'exemple, les Zakawa et Massalite assez majoritaires au l'ouest du Soudan occupent aussi l'est du Tchad et le même cas de figure, on peut l'observer entre le Tchad et la RCA, qui partage les mêmes groupes ethniques tels que les Sara, les Boume et bien d'autres. Les sources humanitaires attribuent d'ailleurs la cohabitation pacifique entre la communauté hôte et les réfugiés à ces liens familiaux très forts (C. Barbière, 2018). L'enlisement des réfugiés dans les camps et les sites d'accueil doublé par l'absence d'une perspective de retour à court terme, a conduit le gouvernement et ses partenaires humanitaires à adopter une nouvelle stratégie. Celle-ci est axée sur la prise en charge à la fois des réfugiés et de la communauté d'accueil. Il s'agit de transformer les camps de réfugiés existants en villages (« villagisation des camps ») et ceux installés dans la périphérie des villes en quartiers. En effet, l'objectif de ce programme consiste à intégrer les réfugiés au sein des populations d'accueil, à garantir leur accès à des services essentiels tels que la santé et l'éducation (UNHCR Tchad 2018). En 2018, cette nouvelle politique s'est traduite par l'installation des réfugiés hors camps. C'est ainsi que plus de 20 000 nouveaux réfugiés centrafricains ont été installés ou relocalisés dans les nouveaux sites et villages hôtes. Aussi, 108 établissements (75 écoles primaires et 33 secondaires) sous mandat de HCR ont été officialisés. Ces établissements adoptent désormais le programme scolaire tchadien et accueillent indifféremment les réfugiés et la population hôte. A ce sujet, le Tchad est présenté comme un modèle d'intégration des réfugiés dans le domaine de l'éducation (UNHCR, 2018). Si les différentes structures et initiatives permettent de mieux gérer les réfugiés de la guerre civile, elles semblent inadaptées et inopérantes pour les réfugiés de la guerre anti-terrorisme. b) Les réfugiés nigérians : de la sympathie à la stigmatisation i. Nigerian refugees: from sympathy to stigmatization Si le problème de la gestion et de l'accueil des réfugiés soudanais et centrafricains se posait en termes de cohabitation et de partage des ressources avec la communauté hôte, celui des réfugiés ou des ressortissants nigérians se présente dans une autre dimension, qui est d'ordre sécuritaire, surtout après l'implication directe du Tchad dans le conflit. Les réfugiés nigérians sont d'ailleurs peu nombreux sur le sol tchadien par rapport aux autres pays voisins. En fait, les activités de Boko Haram dans la région du bassin du lac Tchad ont occasionné le déplacement de plus de 2,2 millions de Nigérians et fait plus de 450 000 réfugiés au Cameroun, au Niger et au Tchad voisins (BBC 2016). L'ampleur dramatique de la crise de Boko Haram à l'échelle sous-régionale se manifeste par le nombre de tués et de personnes affectées entre 2010 et 2017. Selon les sources humanitaires et médiatiques, le nombre des personnes tuées par la secte durant cette période oscillait entre vingt et trente mille. En mars 2020, on avance déjà les chiffres de 35 000 morts (M. Macé, 2020). Cependant, Action contre la Faim parle de 20 000 000 personnes impactées indirectement par la crise de Boko Haram. Selon cet organisme humanitaire, les parties en conflits utilisent la faim comme arme de guerre (G. Calaf, 2017). Il faut souligner que ces décomptes n'ont qu'un caractère estimatif à cause de la nature du conflit, mais révèlent l'ampleur du drame dont les victimes sont essentiellement des civils. Au Tchad cependant, les réfugiés nigérians ne représentent qu'un peu plus de 2% par rapport au total des réfugiés enregistrés en juin de 2018 par le HCR. Ils sont concentrés à l'ouest, dans la région du lac Tchad et essentiellement à Baga Sola. Toutefois, on signale l'arrivée dans ville de N'Djamena d'un nombre indéterminé de Nigérians ainsi que de ressortissants tchadiens installés depuis des lustres au Nigéria. Ceuxci ont trouvé refuge auprès d'un parent, d'un ami, ou loué un logement dans les quartiers de la capitale. Mais, dans la plupart des cas, ils vivaient de la débrouillardise et ne sont mêmes pas fait recenser et ni prendre en charge par le HCR. Ces Nigérians et retournés ont suscité de la compassion et de la sympathie au sein de la population tchadienne entre 2010 et 2014. Ce sentiment résulte sans doute de récits émouvants des massacres effroyables et inouïs commis à leur encontre par les éléments de Boko Haram et aussi par la brutalité de l'armée nigériane. En fait, ceux installés dans la capitale se sont fondus dans la masse n'djamenoise. En effet, leur présence ne se manifeste d'ailleurs que par l'apparition de nouveau type de « vendeur ambulant en brouette », spécialisé dans la vente d'oignon et d'ail, ou par l'augmentation inhabituelle des mendiants tout autour de différents ronds-points de la ville de N'Djamena dont en majorité des femmes et des enfants. L'arrivée des réfugiés nigérians sur la rive tchadienne du lac Tchad coïncide avec la montée en puissance de Cependant dans le sud du pays, les réfugiés centrafricains parviennent à s'intégrer grâce à l'abondance des ressources, surtout, pour ceux qui s'adonnent à l'agriculture. Toutefois, les problèmes de cohabitation surgissent avec les réfugiés éleveurs Peul, sous sa forme habituelle « conflit éleveurs-agriculteur ». L'impossibilité de retour volontaire de ces réfugiés à court terme à cause de la persistance de l'insécurité dans leur pays d'origine, a débouché depuis 2018, sur un programme d'intégration de ces réfugiés dans leurs environnements d'accueil. Il s'agit de transformer les camps en villages et ceux dans la périphérie de la ville en quartier. On s'inscrit dès lors, dans une perspective d'intégration de cette catégorie des réfugiés dans la communauté nationale. L'arrivée de quelques milliers de réfugiés nigérians fuyant Boko Haram au Tchad entre 2010 et 2014 n'a pas influé sur la politique d'accueil des réfugiés. Mais, l'implication du Tchad, en janvier 2015, contre la secte Boko Haram et la réaction brutale de celle-ci à travers une guerre asymétrique sur le sol tchadien, ont constitué un tournant dans l'accueil des réfugiés, surtout pour ceux qui ont fui les violences terroristes. La lutte contre les éléments de Boko Haram à l'intérieur du pays a pris l'allure d'une « chasse à l'homme » dont les gibiers étaient des réseaux dormants, qui ont fomenté les attaques-suicides meurtrières de juin et juillet 2015 à N'Djamena. Aussi, les réfugiés et les retournés nigérians se voient associés aux affidés du Boko Haram. Ils sont soumis au contrôle au faciès, aux dénonciations et aux rafles au lendemain de ces attaques terroristes. La secte semble être actuellement incapable de mener des attaques sur la capitale tchadienne comme celles de 2015. En fait, les mesures antiterroristes et la politique ultrasécuritaire ont paralysé la capacité de la secte à atteindre N'Djamena. En effet, l'absence d'une base sociale et le retour de la plupart des réfugiés nigérians dans leur pays ou leur transfert au camp de Dar es Salam à Baga Sola, ont privé la secte de toute possibilité d'infiltration. Toutefois, la secte reste active dans la région du lac Tchad malgré la proclamation de l'état d'urgence et la militarisation de la zone. Les éléments de Boko Haram trouvent refuge dans les labyrinthes du Tchad. Ils y mènent une guérilla violente et répétée prenant assez souvent l'armée au dépourvu. Ces différentes actions de la secte et les opérations de représailles de l'armée créent un climat d'insécurité et entrainent un flot de réfugiés et de déplacés, qui devient récurrent et cyclique. Ceux-ci se trouvent pris en étau entre les attaques de Boko Haram, la répression de l'armée nigériane et la stigmatisation dans le pays d'accueil. Cette situation inédite a débouché, nous semble-t-il, sur l'apparition d'une distinction entre de « bons refugiés », c'est-à-dire ceux venant de la zone de guerre civile, et de « mauvais refugiés », c'est-à-dire ceux de la guerre asymétrique. Cette dualité de traitement remet en cause le droit à la protection des réfugiés dont sa sacralité universelle ne saurait être préservée qu'en prenant en compte la spécificité de la guerre asymétrique. En d'autres termes, le doit à l'asile et au statut de réfugiés doit nécessairement prendre en compte, les impératifs sécuritaires du pays hôte. A cet effet, un hub de tri en amont de ces réfugiés, permet à la fois de juguler d'infiltration des éléments terroristes et d'empêcher des pays à prendre des mesures discriminatoires et arbitraires à l'encontre de réfugiés de la guerre asymétrique. reprendre la main sur la question de réfugiés avec lab) La gestion collégiale des flux de réfugiés et lastructuration du mécanisme d'accueil ainsi que parstructuration de l'accueilVolume XXII Issue II Version IEn 2011, la révolution libyenne redéfinit les règles du jeu. Chefs de milices et trafiquants se servent alors dans les stocks de l'ancien régime, et alimentent à la fois les conflits intra-libyens et régionaux. La ville de Sebha, dans le Fezzan, se transforme bientôt en hub régional du trafic d'armes du fait de sa proximité avec plusieurs entrepôts. (Jeune Afrique, 2011). Ce climat d'instabilité de nature diffuse et souvent inédite, a entrainé une arrivée massive de réfugiés et de ressortissants tchadiens dans le pays. codification de l'accueil des réfugiés. C'est ainsi que la CNARR s'est déployée dans les provinces accueillant les réfugiés afin de permettre, l'identification, l'enregistrement, la détermination et la documentation des réfugiés (UNHCR, 2018). Cependant, cette nouvelle politique se situe par rapport à la stratégie de la communauté humanitaire, surtout du HCR. En effet, ces différentes structures, sont très dépendantes financièrement des organismes humanitaires, dans leur fonctionnement mais aussi dans leurs activités. Ces différentes structures tentent d'assurer la survie des réfugiés et d'améliorer leur environnement d'accueil en inventant de nouveaux concepts et des lois tendant à prendre en charge à la fois les réfugiés et la communauté hôte. Il s'agit d'amorcer d'une cohabitation pacifique entre les deux communautés et d'amorcer d'une intégration progressive des réfugiés dans la communauté locale. Mais le traitement réservé aux exilés durant ces dernières années tend à connaître une approche catégorielle, distinguant s'il s'agit d'une guerre civile ou d'une guerre asymétrique. II. Catégorisation des Réfugiés en Fonction de la Nature du Conflit a) Categorization of refugees according to the nature of the conflict i. De la cohabitation à l'intégration des réfugiés de la guerre civile From cohabitation to the integration of civil war refugees La nature du conflit semble influencer l'attitude de gouvernement du Tchad, en matière d'accueil des réfugiés. En effet, sa politique vis-à-vis des réfugiés de la guerre civile, est axée sur l'inclusion des réfugiés dans la communauté locale ainsi que leur insertion socio-économique dans le pays. Cette approche s'applique aux réfugiés du Soudan et de la RCA. Les premiers ont été accueillis à l'est depuis février 2003, sur le long des frontières tchado-soudanaises, dans douze camps de réfugiés. Tandis que les seconds ont été installés depuis décembre 2013 et début 2014 dans six camps et dix-sept villages hôtes dans le Sud et à l'intérieur du pays. En effet, la population centrafricaine se réfugie au Tchad dans les différents épisodes d'instabilités en RCA, surtout, entre 2003 et 2005 (Diallo Issagha, 2020). Ces réfugiés semblent toujours susciter de la sympathie de la communauté hôte, malgré quelques incidents sur des points d'eau et des pâturages, surtout, avec les éleveurs peuls (Célian Macé 2018). Il ne s'agirait là que d'une des manifestations de l'éternel conflit éleveur-cultivateur et cela ne témoignerait pas d'un véritable problème de cohabitation avec les réfugiés.Comité Local d'Action (CLA), le Comité Départemental d'Action (CDA) et le Comité Provincial d'Action (CPA) sont ainsi chargés d'accompagner les acteurs humanitaires aux différents niveaux de l'administration tchadienne (GTS, 2019). En mai 2018, le pays adhère au Cadre d'Action Global pour les Réfugiés (CAGR) dont l'objectif principal n'est que la mise en application de la déclaration de i. Dans un récent document de l'ONU, le nombre New York. Le CAGR vise à alléger le fardeau résultant des réfugiés et des déplacés ne cesse d'augmenter. En de la présence massive et prolongée de réfugiés effet, à la fin de 2020, le Tchad compte 917 535 dans le pays. C'est sous l'impulsion des organismes personnes déplacées dont quelque 500 000 réfugiés et humanitaires, surtout du HCR, que la loi d'asile est 350 000 déplacés internes, et 100 000 Tchadiens de la adoptée par le parlement en décembre 2020, puis RCA et de la région du Lac (ONU Info, 2020). Il en promulguée à la fin de la même année. Elle définit les ressort ainsi une hausse de nombre des réfugiés à conditions d'obtention du statut de réfugié et faire hauteur de 10% par rapport aux chiffres avancés par le décroître la pression des réfugiés sur le Tchad en HCR en décembre 2018. Il est malaisé de déterminer assurant leur protection et leur développement dans les avec exactitude le nombre des réfugiés, des déplacés zones d'accueil 2 . Il semble que l'Etat tchadien tente de ainsi que des retournés. En effet, les sources humanitaires donnent des chiffres contradictoires souvent assez déconcertants. Cela peut toutefois, s'expliquer par le flot incessant des réfugiés, parYear 2022Mbow, 2017: 88-92). C'est ainsi que la région du Darfour, dans l'ouest du pays, se rebelle en 2003 et s'ensuit une guerre civile meurtrière et dramatique. Le drame engendré par ce conflit avait été présenté par certains 14 ( ) l 18Volume XXII Issue II Version IIII. L'afflux massif des réfugiés au début des Conclusion années 2000, est confronté à l'absence des structures d'accueil et à la récurrence des conflits armés au Tchad. Il est depuis longtemps un foyer des tensions ardentes et d'instabilité en Afrique, Mais paradoxalement, le( The Reception of Refugees in Chad in the Context ofInstability and Asymmetric War (2003 -2020) © 2022 Global JournalsDThe Reception of Refugees in Chad in the Context ofInstability and Asymmetric War (2003 -2020) Présenté comme le cerveau de l'attaque de N'Djamena et qui est considéré aussi comme logisticien de Boko Haram au Cameroun, au Niger et au Tchad. * « Cameroun : l'attaque de Boko Haram repoussée par l'armée AFP 12 2015 * Double malheur : Aggravation de la crise des droits humains au Tchad 2008 Peter Benenson House Londres Amnesty International * Tchad, l'autre visage de la crise des réfugiés », EURACTIV.fr, 24 juil CBarbière Au 2018 * « Alliance Boko Haram-Daesh : ONU inquiète BBC 14 2016 * « Au Tchad, la traque de Boko Haram s'accélère TBerthemet 2015 * « 20 millions de personnes affectées par le conflit avec Boko Haram demeurent dans l'oubli », Action contre la faim GCalaf 2017 17 * Décision d'aide humanitaire 2004 Bruxelles Commission européenne * 2020 Camp de réfugié d'Amboka, Observatoire des Camps des réfugiés IDiallo Pôle Afrique * Insertion socioéconomique des réfugiés centrafricains de la zone de Goré (Tchad) DjimadoumguéTamdjim 2019 Paris, Edilivre * JFavre DOI: 10.40 00/echogeo.2061 Réfugiés et déplacés dans l'Est du Tchad 2007 En ligne. 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